Lancement d’un parcours de soins pour détecter des lésions cutanées potentiellement à risque. Un Service public apporté à la population : faute de spécialistes, la CPTS du Pays de Gex forme ses médecins généralistes à la Dermatologie.
Les cancers de la peau en France
80 000 nouveaux cas de cancers cutanés sont diagnostiqués en France chaque année (source INCA) dont les plus graves sont les mélanomes cutanés. En augmentation constante depuis 50 ans, on dénombre 15 500 nouveaux cas, dont 1 800 décès chaque année (INCA). Pourtant, détectés et diagnostiqués à temps, ils sont guérissables. Les efforts d’éducation, d’information et de responsabilisation doivent donc être poursuivis et renforcés.
D’abord le constat : le Pays de Gex ne compte plus de dermatologues depuis bientôt 10 ans ! La dermatologie en France est une spécialité en tension. Nous avions deux dermatologues dans les années 2010, mais elles sont parties en retraite. Depuis, nos patients doivent se rendre à St Julien, Annecy (74), Chalamont, Meximieux, ou encore Bourg-en-Bresse (01) pour consulter un spécialiste.
En 2023, la CPTS du Pays de Gex a conclu un accord de partenariat bipartite avec l’hôpital d’Annecy (CHANGE). Nous avons ainsi pu mettre en place une formation de dermatologie, qui s’adresse aux médecins généralistes et autres professionnels de santé (pharmaciens, kinés, ostéopathes, infirmiers, pédicures-podologues, etc…). Cette formation se compose d’une partie théorique et d’une montée en compétences de médecins généralistes volontaires, spécialement formés aux biopsies et repérage de lésions. Les différents professionnels de santé formés théoriquement sont susceptibles d’orienter les patients sur nos consultations assurées par les médecins généralistes « experts ».
- Nous avons mis en place deux fois par mois des consultations de détections et analyses (et si besoin exérèse) de lésions dermatologiques potentiellement à risque cancéreux. Selon les résultats et situations, le patient est adressé soit à un Médecin chirurgien du Pays de Gex pour ablation de la lésion, soit vers une demande de téléexpertise soit vers un RDV avec le service de Dermatologie du CHANGE ou d’un cabinet libéral de Dermatologie au plus proche du Pays de Gex.
- Nous organisons également une fois par an une journée de dépistage de lésions cancéreuses et aussi de formation à l’auto-diagnostic. Cette première dans le Pays de Gex aura lieu le 14 mai 2024 à Prévessin, sur RDV uniquement !
- La CPTS s’est équipée d’un dermatoscope connecté pour les consultations de Dermatologie fait par les médecins généralistes formés. Il s’agit d’un appareil haut de gamme, qui permet d’agrandir dix fois la lésion cutanée. Le dermatoscope peut aussi être relié à un téléphone portable afin de prendre une photo et de l’envoyer à un dermatologue du CHU d’Annecy en cas de doute. Cela nous permet d’obtenir un diagnostic de spécialiste dans les 72 heures si besoin.
Les patients prennent ainsi l’habitude de consulter leur généraliste pour leurs problèmes de peau. La dermatologie est une profession sinistrée et cela nous permet de pallier le manque de professionnels. En outre, les dermatologues hospitaliers et libéraux ont ainsi moins de sollicitations et sont consultés à bon escient. Pour les patients, c’est un gain de temps énorme et cela diminue la perte de chance due à un retard de diagnostic
Comment détecte-t-on un cancer de la peau ?
Un examen régulier de votre peau et, contre le mélanome, la surveillance de vos grains de beauté sont les meilleures façons de détecter un cancer cutané dès son apparition (en savoir plus).
Grain de beauté (bénin) ou mélanome (malin) ?
Trois éléments sont à retenir :
- tous les grains de beauté d’une personne se ressemblent : celui qui « n’est pas comme les autres » doit donc attirer votre attention. C’est le principe du « vilain petit canard » ;
- soyez vigilant à tout changement : une tache brune apparaissant sur votre peau ou un grain de beauté changeant d’aspect doivent vous amener à consulter un médecin ;
- la « règle ABCDE » peut vous aider à reconnaître les signes d’alerte d’un mélanome :
La présence d’un ou plusieurs de ces signes ne signifie pas forcément que vous avez un cancer de la peau mais justifie de demander un avis médical sans attendre.
Soyez également attentif à l’apparition de signes comme :
- une plaie qui ne guérit pas ;
- un bouton ou une croûte qui persiste ou s’étend.
Qui consulter et à quelle fréquence ?
Si vous avez des facteurs de risque de cancer de la peau ou que vous repérez une tache suspecte, consultez votre médecin traitant. Il vous orientera vers un dermatologue si nécessaire.
Le dermatologue est l’expert pour réaliser l’examen clinique de la peau, confirmer ou non une suspicion de cancer et retirer une lésion suspecte s’il l’estime nécessaire. Il évalue également la fréquence à laquelle vous devez surveiller ou faire surveiller votre peau.
Pour les personnes considérées comme à risque, il est généralement recommandé de se faire examiner au moins une fois par an et de pratiquer un auto-examen tous les trois mois.
Le dépistage : un examen simple et indolore
Le dermatologue pratique des examens cliniques de la peau tous les jours à son cabinet. Concrètement, il réalise un examen visuel complet de votre peau pour repérer les taches ou grains de beauté pouvant faire suspecter un cancer. Il peut s’aider d’une sorte de loupe éclairante et très grossissante qui permet de voir à travers la première épaisseur de l’épiderme : un dermatoscope. Si vous présentez de nombreux grains de beauté, il peut aussi les prendre en photo.
S’il identifie une lésion suspecte, le dermatologue vous propose alors soit de la surveiller, soit de la retirer sous anesthésie locale et de la faire analyser pour confirmer, ou non, son diagnostic. Cette intervention peut être réalisée à son cabinet ou à l’hôpital. Elle ne nécessite pas d’hospitalisation.
L’auto-examen de la peau
Si vous êtes un sujet à risque de mélanome, le dermatologue vous formera à la pratique de l’auto-examen. Il s’agit d’observer attentivement votre peau nue, de la tête aux pieds, de face et de dos, sans oublier les zones peu visibles où peut se cacher un mélanome (oreilles, ongles, plante des pieds, espaces entre les doigts ou les orteils, organes génitaux…).
Si vous avez un grand nombre de grains de beauté (plus de 40), la réalisation régulière de photos peut être utile pour observer de petits changements qui seraient passés inaperçus sans cela.
Cancer de la peau : quel est votre niveau de risque ?
Tout le monde est susceptible de développer un cancer de la peau, notamment un mélanome, et on peut être touché à tout âge, même jeune. Cependant, nous ne sommes pas tous égaux face aux risques.
Surveillez particulièrement votre peau si :
- vous avez la peau claire, les cheveux blonds ou roux et vous bronzez difficilement ;
- vous avez de nombreuses taches de rousseur ;
- vous avez de nombreux grains de beauté (≥ 40) ;
- vous avez des grains de beauté larges (+ de 5 mm) et irréguliers ;
- vous avez ou des membres de votre famille ont déjà eu un mélanome ;
- vous avez reçu des coups de soleil sévères pendant l’enfance ou l’adolescence ;
- vous avez vécu longtemps dans un pays avec une forte exposition solaire ;
- votre mode de vie (profession ou activité de loisir) donne lieu à des expositions solaires intenses.
- vous avez un état immuno-déprimé (corticothérapie au long court>1 an, tt anti-cancereux, tt anti-rejet, tt VIH, tt à l’hydrochlorothiazide…)
- vous avez une greffe de rein
- vous avez plus de 65 ans
Il est généralement recommandé :
- d’effectuer un auto-examen de votre peau tous les trois à six mois : le dermatologue vous apprend à le faire ; il s’agit d’observer attentivement sa peau nue, de la tête aux pieds, de face et de dos, sans oublier les zones peu visibles (oreilles, ongles, plante des pieds, espaces entre les doigts, organes génitaux…)
- de vous faire examiner par un dermatologue une fois par an.
En fonction de votre niveau de risque, votre médecin traitant ou votre dermatologue peut vous proposer des modalités de surveillance plus rapprochées.
Le saviez-vous ?
Le bronzage n’est jamais bon pour la santé ! Exposer sa peau au soleil constitue en effet une agression de la peau. En plus d’augmenter le risque de cancers cutanés, le bronzage favorise un vieillissement accéléré de la peau. Et la vitamine D, alors ? Pour éviter une carence, une exposition du visage et des avant-bras est suffisante : durant l’été, 5 à 10 minutes par jour ; sous les nuages ou pour les peaux les plus foncées, 30 minutes, 2 à 3 fois par semaine. Certains médicaments ont un impact sur la sensibilité au soleil : parlez-en avec votre médecin ou votre pharmacien.
Les principaux cancers cutanés
La détection précoce des cancers de la peau offre de meilleures chances de guérison, en particulier dans le cas des mélanomes cutanés. Agir rapidement est donc vital. C’est pourquoi, il est important de se faire détecter un cancer de la peau (carcinome ou mélanome) au plus tôt.
Pour s’informer sur le sujet : Sauver sa peau
Les carcinomes basocellulaires
Ils représentent 70 % des carcinomes cutanés. Ce sont les plus fréquents et les moins graves dans la mesure où ils menacent rarement le pronostic vital. En effet, leur développement, à partir de la couche basale de l’épiderme, reste local. Ils ne métastasent jamais et leur ablation complète assure la guérison du patient.
Leur traitement doit néanmoins être précoce car ces tumeurs peuvent s’étendre en surface, ce qui peut rendre l’exérèse difficile et entraîner des séquelles esthétiques ou fonctionnelles. Ils apparaissent le plus souvent après 50 ans, mais peuvent toucher des individus plus jeunes. Ils sont habituellement localisés sur les parties découvertes du corps (visage, cou, dos des mains, …). Ces cancers augmentent progressivement de taille.
Leur danger est lié à leur potentiel invasif local qui va entraîner des destructions tissulaires. Le traitement de première intention est l’ablation chirurgicale.
Les carcinomes épidermoïdes (spinocellilaires)
Ils sont plus rares (20 % des cancers cutanés) mais plus agressifs. Ils apparaissent surtout après 60 ans et surviennent, comme les précédents, préférentiellement sur des zones découvertes. Ils se développent à partir des kératinocytes qui migrent dans le derme.
Contrairement aux carcinomes basocellulaires, ils se développent parfois sur des lésions dites pré-cancéreuses : kératoses actiniques (ce sont des modifications de la peau ayant l’aspect de croûtes qui reposent sur une base rouge, ces lésions ne sont pas cancéreuses mais peuvent se transformer en carcinomes épidermoïdes). Ces cancers peuvent aussi apparaître sur des radiodermites (modifications de la peau produites par les radiations ionisantes), sur des cicatrices de brûlures, des plaies chroniques. Des virus de type HPV sont suspectés de jouer un rôle dans la genèse de certains de ces cancers localisés aux muqueuses (col de l’utérus, anus).
Plus agressifs que les carcinomes basocellulaires, ils sont susceptibles d’envahir les ganglions lymphatiques et se disséminer dans d’autres organes (poumons, foie, cerveau).
Les plus agressifs sont ceux localisés aux zones péri-orificielles et aux muqueuses (nez, bouche, organes génitaux).
Le mélanome
C’est le cancer de la peau le plus grave. Les mélanome cutanés représentent 10% des cancers de la peau. Cette tumeur maligne peut apparaître sur une peau saine (70 à 80% des cas) ou résulter de la transformation maligne d’un grain de beauté (naevus). Les UV jouent un rôle important dans leur apparition. Avec 15404 nouveaux cas de mélanomes cutanés estimés en 2017 en France Métropolitaine, le mélanome cutané se situe au 9ème rang des cancers, tous sexes confondus, et représente 3,7% de l’ensemble des nouveaux cas de cancers et 1,2% des décès.
Près des trois quarts des cas sont diagnostiqués au-delà de 49 ans. On estime en France le nombre de décès imputables à ce cancer à 1 783 en 2017. Lorsqu’il est détecté tôt à un stade peu développé, il peut la plupart du temps être guéri. Le traitement repose alors sur une exérèse chirurgicale.
À l’inverse, un diagnostic tardif réduit considérablement les chances de guérison car ce cancer a un fort potentiel métastasique : il peut s’étendre rapidement aux relais ganglionnaires et à d’autres organes. Quelques mois peuvent suffire pour qu’un mélanome devienne très agressif et s’étende à d’autres parties du corps (métastases). Les mélanomes cutanés diagnostiqués à un stade métastatique sont de mauvais pronostics, les taux de survie à 5 ans ne dépassant pas 20 % pour ces patients.
Agir rapidement est donc vital, c’est pourquoi la prévention et le diagnostic précoce sont essentiels.